Économie de guerre en RDC : Une solution radicale pour mettre fin au pillage et massacres à Goma et Bukavu ?
Économie de guerre en RDC : Une nécessité face à l’agression rwandaise ?19. Feb. 2025
Introduction
Depuis février 2025, la République Démocratique du Congo (RDC) fait face à une invasion militaire du Rwanda, dont l’armée occupe les villes de Goma et Bukavu. Les rapports des Nations unies font état de massacres et du pillage massif des ressources minières, notamment le coltan, dans la localité de Rubaya, une région qui représente plus de 70 % de la production mondiale de ce minerai stratégique. Pendant que le président rwandais Paul Kagame poursuit ses offensives militaires, le président congolais Félix Tshisekedi mise toujours sur la diplomatie pour résoudre ce conflit. Mais alors que l'Occident ferme les yeux sur cette guerre, la question se pose : la RDC doit-elle entrer dans une économie de guerre pour faire face à cette agression ?
Qu’est-ce qu’une économie de guerre ?
L’économie de guerre est un système dans lequel un État mobilise l’ensemble de ses ressources – humaines, financières et industrielles – pour soutenir l'effort militaire et garantir sa survie face à un conflit armé. Cela implique une restructuration complète de l’économie nationale : augmentation des dépenses militaires, conversion des industries civiles en industries militaires, restrictions budgétaires sur certains secteurs non prioritaires, et mise en place d’un contrôle étatique renforcé sur les ressources stratégiques.
Cadre juridique : Qu’en dit la constitution congolaise ?
La constitution de la RDC prévoit la possibilité d’une mobilisation nationale en temps de guerre. L’article 85 stipule que "le président de la République déclare la guerre et signe les traités de paix avec l’autorisation du Parlement". De plus, l’article 144 autorise le chef de l’État à décréter l’état de siège ou l’état d’urgence en cas de "péril imminent menaçant l’indépendance ou l’intégrité du territoire". Ces articles pourraient servir de base pour instaurer une économie de guerre.
Avantages et inconvénients d’une économie de guerre
Avantages :
Renforcement de l’armée : Une économie de guerre permettrait à la RDC d’augmenter massivement son budget militaire et de moderniser ses forces armées.
Mobilisation nationale : Elle favoriserait une unité nationale et une implication plus grande de la population.
Sécurisation des ressources stratégiques : Le contrôle étatique des mines et des exportations éviterait que ces richesses tombent entre les mains de l’ennemi.
Inconvénients :
Effondrement des secteurs non militaires : Une concentration excessive sur la guerre pourrait affaiblir d’autres secteurs économiques comme l’agriculture et les services.
Détérioration des relations internationales : Une économie de guerre pourrait isoler la RDC sur la scène internationale, notamment vis-à-vis de ses partenaires économiques.
Restrictions des libertés : Un tel régime pourrait entraîner un contrôle accru de l’Etat sur la société, limitant les libertés publiques.
L’exemple de la Russie : Vladimir Poutine et l’économie de guerre
Depuis 2022, la Russie de Vladimir Poutine a progressivement transformé son économie en une économie de guerre pour soutenir son conflit contre l’Ukraine. En augmentant massivement les dépenses militaires, en réquisitionnant des industries civiles et en mettant en place des politiques de mobilisation générale, Moscou a réussi à maintenir un effort de guerre soutenu malgré les sanctions occidentales. Cette stratégie pourrait inspirer la RDC si elle devait choisir cette voie.
Fonctionnement d’une économie de guerre
Une économie de guerre repose sur plusieurs piliers:
Mobilisation des ressources: Réaffectation des budgets publics, taxation accrue et utilisation des réserves nationales
Contrôle des industries stratégiques: Nationalisation des mines de coltan, d’or, de diamant, de cuivre, de cobalt, de cassitérite, de Nickel, de Tungstène,d’uranium, de Tantale, de niobium pour financer l’effort de guerre
Mobilisation de la population: Service militaire obligatoire, travail forcé´dans les industries de guerre, et sensibilisation de l'opinion publique
Coordination internationale: Recherche de nouveaux alliés non-occidentaux pour contourner le soutien occidental au profit du Rwanda.
Le rôle de la communauté internationale
La communauté internationale, notamment l’Union européenne et les Etats-Unis, semble avoir choisi son camp (Paul Kagame ). Les accords signés entre l’UE et le Rwanda le 19 février 2024, ainsi que la déclaration d’admiration de Donald Trump envers Paul Kagame, montrent un soutien implicite à Kigali. Cela complique la position de la RDC, qui ne peut compter que sur elle-même et sur quelques alliés non-occidentaux et régionaux pour faire face à cette agression.
Question clé: Comment la RDC peut-elle rompre avec cette dépendance vis-a-vis des puissances occidentales et trouver de nouveaux partenaires stratégiques ?
Quand déclarer une économie de guerre ?
La décision d’entrer dans une économie de guerre ne doit pas être prise à la légère. Elle doit être envisagée lorsque toutes les autres options, notamment diplomatiques, ont échoué. Dans le cadre de la RDC, la situation actuelle semble justifier une telle mesure:
l’occupation rwandaise de Goma et Bukavu
le massacre des civils et des enfants á Bukavu et le pillage des ressources minières à Rubaya.
l'échec des initiatives diplomatiques de Felix Tshisekedi notamment lors de la conférence sur la sécurité à Munich, en Allemagne le 17.février.2025
Cependant, une économie de guerre ne sera efficace que si elle est accompagnée d’une réforme profonde de l’armée congolaise , d’une mobilisation de la population, de la fin de la corruption et du tribalisme dans les institutions de l’État et du gouvernement de Felix Tshisekedi.
Conclusion
Face à l’occupation rwandaise et à l’inaction de la communauté internationale, la RDC doit réfléchir à l’option d’une économie de guerre pour mettre fin à cette crise. Cependant, cette décision implique des sacrifices et des risques majeurs. Le président Tshisekedi doit faire face à un choix historique : continuer sur la voie diplomatique ou mobiliser toutes les ressources de l’État pour assurer la souveraineté nationale. Quelle que soit la décision, le temps presse pour la RDC.
Face à l’agression rwandaise et à la complicité de la communauté internationale, l’entrée dans une économie de guerre pourrait être la seule solution pour préserver l’intégrité du territoire et les ressources nationales.
Écrit en Allemagne, ce 19 février 2024, un an après les accords entre l’UE et le Rwanda sur le pillage du coltan à l'est de la RDC et les massacres des civils par l’armée de Paul Kagame.
Kapayo Alimasi (Chercheur congolais indépendant)
kapayoalimasi@gmail.com
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