PRIX NOBEL DE L'ÉCONOMIE 2024: Pourquoi Daron Acemoglu et James Davinson ?
DARON ACEMOGLU ET JAMES ROBINSON
Dans Why Nations Fail (2012), Daron Acemoglu et James Robinson expliquent que la prospérité ou l'échec des nations dépend principalement de la qualité de leurs institutions politiques et économiques. Leur thèse centrale repose sur la distinction entre **institutions inclusives** et **institutions extractives**.
- Institutions inclusives : Elles favorisent la participation large des citoyens à la vie économique et politique, protègent les droits de propriété, offrent des opportunités égales et encouragent l'innovation. Ces institutions sont essentielles pour une croissance économique durable, car elles permettent à la majorité de la population de contribuer à la production et de bénéficier des fruits de la croissance.
- Institutions extractives: Elles concentrent le pouvoir et la richesse dans les mains d'une élite restreinte, empêchant la majorité de la population d'accéder aux opportunités économiques et politiques. Ces institutions exploitent les ressources d'une nation au profit de quelques-uns, ce qui finit par étouffer la croissance et provoquer l'instabilité politique et économique.
Leur analyse se fonde sur une étude historique détaillée, montrant que la prospérité ou le déclin des nations dépend souvent de l'évolution de ces institutions au fil du temps. Ils insistent sur l'idée que la richesse ou la pauvreté d'une nation n'est pas déterminée par la géographie, la culture ou d'autres facteurs, mais par ses choix institutionnels.
Les autres théories sur la prospérité et déclin
La question de ce qui détermine la prospérité ou le déclin d'une nation a été au centre des débats économiques et historiques pendant des siècles. Voici un aperçu des différentes théories ainsi que les principaux auteurs qui y sont associés :
1. **Géographie :**
Certains auteurs considèrent que la géographie joue un rôle primordial dans la prospérité des nations. Les théories géographiques soulignent l'influence des facteurs naturels tels que le climat, l'accès aux ressources naturelles, ou la situation géographique d'un pays.
- **Jared Diamond** dans *Guns, Germs, and Steel* (1997) : Il argue que la géographie a largement déterminé le développement des sociétés humaines. Les différences en matière de climat, de biodiversité, et de ressources disponibles ont influencé la capacité des sociétés à s'adapter et à prospérer.
- **Jeffrey Sachs** : Il soutient également que la géographie et l'accès aux ressources naturelles ont un impact direct sur la croissance économique, notamment dans les régions tropicales qui sont plus exposées à des maladies comme le paludisme, entravant ainsi le développement économique.
2. **Culture :**
La culture, comprenant les valeurs, croyances, et comportements d'une société, est parfois vue comme un facteur central dans le succès ou l'échec économique.
- **Max Weber** dans *L'Éthique protestante et l'esprit du capitalisme* (1905) : Weber avance que la culture protestante, notamment la discipline et le travail acharné, a favorisé l'essor du capitalisme en Europe occidentale. Il relie la prospérité à des valeurs religieuses spécifiques.
- **David Landes** dans *The Wealth and Poverty of Nations* (1998) : Landes argue que la culture est un facteur clé pour expliquer les différences de développement économique. Il affirme que certaines sociétés ont su adopter une mentalité orientée vers le progrès et l'innovation, tandis que d'autres sont restées conservatrices et fermées à l'évolution.
3. **Institutions :**
D'autres économistes mettent en avant le rôle des institutions comme facteur fondamental.
- **Daron Acemoglu et James A. Robinson** dans *Why Nations Fail* (2012) : Ils avancent que les institutions politiques et économiques inclusives favorisent la prospérité, tandis que les institutions extractives, qui concentrent le pouvoir et la richesse entre les mains de quelques-uns, conduisent au déclin. Ils rejettent l'idée que la géographie ou la culture soient des déterminants majeurs et insistent sur l'importance du choix institutionnel.
- **Douglass North** : North, prix Nobel d'économie en 1993, met en avant l'importance des institutions dans le développement économique, en soulignant que des institutions stables qui protègent les droits de propriété et encouragent l'innovation sont essentielles à la prospérité.
4. **Facteurs historiques et sociaux :**
Certaines théories intègrent une approche plus globale, mêlant histoire, structure sociale, et politiques économiques.
- **Karl Marx** : Marx considère que les relations économiques et la lutte des classes sont au cœur du développement économique et que la structure des sociétés capitalistes mène inévitablement à des crises économiques et à la pauvreté pour une grande partie de la population.
- **Simon Kuznets** : Ce lauréat du prix Nobel de 1971 a mis en avant le rôle des cycles économiques et des changements structurels, tels que l'industrialisation, dans le développement des nations.
Synthèse des débats :
Le débat entre ces perspectives montre que la prospérité des nations est probablement le résultat de plusieurs facteurs complexes. Certains économistes modernes, tels qu'Acemoglu et Robinson, ont essayé de réconcilier ces points de vue en mettant l'accent sur les institutions tout en reconnaissant que la géographie et la culture peuvent jouer un rôle complémentaire.
Guy Kapayo alimasi
kapayoalimasi@gmail.com
Ce 16.10.2024
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