La Chine déshabille l'occident: une inversion historique des rapports de force par Guy Kapayo
La Chine déshabille l’Occident : une inversion historique des rapports de force
Depuis des décennies, les relations économiques entre l’Occident et la Chine ont été marquées par un transfert technologique asymétrique. Mais aujourd’hui, cette dynamique s’est inversée de façon spectaculaire, bouleversant les équilibres industriels mondiaux. Les récents développements dans les secteurs stratégiques tels que les batteries, l’hydrogène, et les véhicules électriques en sont une illustration éclatante.(Cliquez ici)
1. Une politique d’ouverture stratégique
Il y a quarante ans, la Chine a adopté une stratégie intelligente et ambitieuse : inciter les entreprises occidentales à créer des co-entreprises en échange d’un accès au marché chinois. Cette approche a permis à la Chine de bénéficier de transferts technologiques massifs. Des entreprises comme Alcatel, autrefois leader des télécommunications en France, ou Siemens, pionnier des trains à grande vitesse en Allemagne, ont vu leurs technologies absorbées par leurs partenaires chinois. Rapidement, ces derniers sont passés de collaborateurs à concurrents, puis à dominants, enterrant les anciens champions occidentaux.
2. Le déclassement technologique européen
Aujourd’hui, Bruxelles se voit contrainte d’adopter une position sans précédent : exiger des transferts technologiques de la Chine vers l’Europe dans le cadre d’investissements subventionnés par l’Union européenne. Cette initiative, rapportée par le Financial Times, reflète une réalité amère : l’Europe a perdu son savoir-faire dans les secteurs clés de la transition énergétique, notamment dans la fabrication des batteries et le développement de l’hydrogène. Ces domaines cruciaux, dominés par la Chine, sont devenus les nouveaux piliers de l’économie industrielle mondiale.
3.L’avantage stratégique des Chinois
Comment la Chine a-t-elle réussi à surpasser l’Occident dans ces secteurs ? La réponse réside dans le bouleversement technologique. Pendant un siècle, les constructeurs automobiles européens étaient protégés par leur expertise unique dans les moteurs à combustion. Or, l’avènement des véhicules électriques a nivelé cette barrière d’entrée. Une voiture électrique repose principalement sur une batterie, qui représente environ 40 % de sa valeur totale. Or, la Chine a investi dans ce domaine bien avant l’Occident, développant une avance technologique considérable.
Les batteries électriques, ainsi que les électrolyseurs pour l’hydrogène, constituent aujourd’hui le « cœur » des nouvelles chaînes de valeur industrielles. En conséquence, l’Europe a dû accepter une augmentation de la part de marché des produits chinois dans ces secteurs, atteignant 25 % pour certains segments stratégiques.
4. Des échecs occidentaux emblématiques
Les efforts occidentaux pour rattraper ce retard se heurtent à des obstacles majeurs. L’échec de l’usine de batteries en Scandinavie illustre cette difficulté. Malgré des investissements massifs, ces initiatives restent bien en deçà des réalisations chinoises. En conséquence, l’Europe dépend de plus en plus des technologies et des produits fabriqués en Chine, qu’il s’agisse de véhicules électriques ou de batteries.
Parallèlement, dans le domaine du nucléaire, les Français ont progressivement perdu leur leadership mondial face à une Chine qui a non seulement adopté mais surpassé les technologies occidentales. Alors que la France, autrefois référence, peine à maintenir ses centrales en fonctionnement, la Chine construit et exporte des réacteurs avancés.
5. La course aux nouvelles technologies : 5G, 6G et brevets
Dans les technologies de télécommunications, la domination chinoise est également évidente. Alors que les débats sur la 5G occupent encore l’agenda occidental, la Chine travaille déjà sur la 6G, consolidant son avance. Les entreprises comme Huawei, malgré les restrictions imposées par certains pays occidentaux, continuent de détenir une position stratégique sur le marché global.
Cet avantage s’illustre également dans les dépôts de brevets. Les scientifiques chinois surpassent leurs homologues occidentaux en nombre de brevets déposés, reflétant un dynamisme et une capacité d’innovation accélérés. Cette supériorité scientifique et technologique modifie les équilibres mondiaux.
6. Le classement de Shanghai : un nouvel étalon mondial
Un autre exemple frappant de cette inversion est le classement de Shanghai. Devenu la référence mondiale dans le domaine universitaire, ce classement reflète la montée en puissance des universités chinoises. Jadis dominés par des institutions basées à Londres ou aux États-Unis, ces palmarès mettent désormais en lumière l’excellence académique chinoise, renforçant ainsi son influence sur la scène internationale.
7. Vers une nouvelle économie mondiale
Le retournement des rapports de force entre la Chine et l’Occident s’inscrit dans une réorganisation plus large de l’économie mondiale. Si la Chine a su exploiter l’ouverture des marchés occidentaux pour se hisser au sommet, l’Europe doit désormais redéfinir sa stratégie industrielle. Cela passe par des investissements accrus dans la recherche et développement, la création de partenariats stratégiques, et une meilleure maîtrise des chaînes d’approvisionnement critiques.
8. Quelles perspectives pour l’Europe ?
L’Europe a encore des cartes à jouer, mais cela exige un changement radical de paradigme. Les politiques industrielles doivent s’orienter vers l’autonomie technologique, en particulier dans les domaines de l’intelligence artificielle, des énergies renouvelables, et des matériaux avancés. La coopération intra-européenne pourrait également renforcer les capacités collectives face à la domination chinoise.
De plus, une régulation plus stricte des investissements et des transferts technologiques pourrait limiter l’hémorragie des savoir-faire. L’objectif : transformer les défis actuels en opportunités, en créant un écosystème industriel capable de rivaliser avec la Chine sur la durée.
En somme, l’histoire actuelle est celle d’un élève qui a surpassé ses maîtres. Mais rien n’empêche ces derniers de reprendre leur destin en main, pour peu qu’ils en aient la volonté et la vision.
Guy Kapayo, Chercheur indépendant, Mainz en Allemagne, ce Lundi 09.12.2024
kapayoalimasi@gmail.com
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